Martin Luther (1483-1546) était malade. Pendant une nuit de fièvre, il crut voir Satan en personne entrer dans sa chambre et se poster au pied de son lit. Il avait en mains, un rouleau de papier d'une grandeur prodigieuse qu'il se mit à dérouler avec un sourire de maligne satisfaction sur les lèvres. Le malade, fixant sur le papier ses yeux étonnés, fut consterné en y 'lisant l'énumération de tous ses péchés. Péchés de sa jeunesse et de son âge mûr, fautes cachées et fautes manifestes, négligences et transgressions, tout y était inscrit en caractères aussi noirs qu'il sentait que les péchés eux-mêmes l'avaient été et aussi distincts qu'ils devaient l'être, si Dieu les mettait devant la clarté de sa face. Il sentit son cœur défaillir; ce cœur brave et intrépide qui ne faiblissait jamais devant aucun homme, s'agite; cet œil courageux, qui regardait en face des évêques et des cardinaux, des princes et des empereurs, se trouble en se fixant sur le terrible rouleau. Ses iniquités avaient surpassé sa tête, elles étaient comme un pesant fardeau.
Soudain une pensée consolante traversa son esprit. Se dressant sur son séant et étendant les bras vers le funeste rouleau, il s'écria avec force: « Tu as oublié une chose, tout cela est vrai, trop vrai, mais tu as oublié une chose : Le sang de Jésus-Christ nous purifie de tout péché ! » A peine l'eut-il dit que Satan disparut avec son lugubre rouleau.